Les musées français sont aujourd’hui confrontés à une double injonction : l’une, sociale, vise à démocratiser l’accès à la culture artistique auprès d’une audience toujours plus large et diversifiée ; l’autre, politique, exige que le rayonnement de ces institutions s’inscrive dans le contexte réglementairement contraint de la réduction de la dépense publique. Tout en soutenant ainsi le développement d’actions de médiation adaptées à ce que l’on nomme prosaïquement les différentes typologies de public, la Ville de Caen, dans un remarquable souci de pérennité de sa stratégie culturelle, a néanmoins souhaité sanctuariser les fonds annuellement dédiés aux acquisitions de ses musées. C’est avec la même constance – qu’une longue confiance mutuelle a élevé au rang de fidélité –, que la SAMBAC s’attache à soutenir le musée des Beaux-Arts de Caen dans l’accomplissement de l’une des premières missions permanentes que la loi du 4 janvier 2002 relatives aux musées de France assigne à ces derniers, à savoir « enrichir leurs collections ». Le rôle de mécénat collectif de nos Amis, grâce à l’écoute toujours bienveillante de leur président, monsieur Christian Ferré, et des membres du bureau de l’association, s’est exprimé de manière particulièrement dynamique et généreuse durant ces quatre dernières années, tout en s’accordant aux principales orientations d’enrichissement définies par le Projet scientifique et culturel (PSC) du musée actuellement en cours de rédaction.
L’un de ces axes vise à étoffer le panorama des grands maîtres français, italiens et des écoles du Nord, depuis le xvie jusqu’au xixe siècle, qu’offre aujourd’hui la collection caennaise, dont la haute qualité commande une exigence toute particulière quant à la sélection des œuvres méritant d’y faire leur entrée ad aeternam. Ainsi, au sein d’un parcours de visite alors entièrement repensé, le musée a entrepris en 2016 l’acquisition d’un spectaculaire tableau du peintre anversois Gérard Seghers (1591-1651), destiné à être accroché en regard de l’Abraham et Melchisédech de son illustre contemporain et compatriote Pierre-Paul Rubens (1577-1640). Présenté par la galerie Claude Vittet au salon Paris-Tableau de 2014, ce Saint François et l’ange musicien est l’un des rares témoignages du voyage de l’artiste en Espagne entre 1617 et 1620, dans la suite du cardinal Zapata, après un séjour à Rome où il s’était approprié les jeux de clair-obscur du Caravagei. Se montant à 250 000 euros, cet achat exceptionnel fut amorcé par une contribution de la SAMBAC à hauteur de 10 000 euros, puis rendu possible grâce à un plan de financement auquel contribuèrent la Ville de Caen, la Région Normandie (via le FRAM), et le ministère de la Culture et de la Communication qui, à travers le Fonds du patrimoine, reconnut ainsi l’intérêt majeur de cette toile pour le patrimoine non seulement caennais mais aussi national. Les 8% finaux de la somme nécessaire, soit 20 000 euros, furent réunis en trois mois, entre janvier et mars 2017, au moyen d’une campagne de souscription publique – la première de l’histoire du musée – qui suscita l’enthousiasme de quelques cent cinquante donateurs.